COMBAT CONTRE L\' HYPERPHAGIE COMPULSIVE

Naissance d'une Hyperphage

On ne naît pas hyperphage mais on le devient. Mon expérience n'est pas de raconter sa vie dans le détail mais plutôt de comprendre LE mécanisme enclencheur de ce système vicieux qui se transformera vite en maladie.

Pour faire dans le rapide et le concret, j'opte pour une discrétion sur la famille car je ne souhaite pas faire un procès ouvert de celle-ci.

Bien entendu, il faut remonter à l'enfance, dans mon cas, pour commencer à comprendre... Née d'un père alcoolique, insultant, inintéressant mais travailleur et d'une mère dépressive mais artistique, il m'a fallu une première thérapie chez le psychiatre pour toute cette époque liée à l'enfance. Pour faire simple, ne comprenant pas les raisons pour lesquelles ma mère pleurait et voulait se suicider, je pensais que c'était ma faute car j'étais la dernière de la famille et mon surnom était "l'accident". A plusieurs reprises, j'ai entendu dire que je n'étais pas voulue.

Mon père travailleur et alcoolique, devait vite aller se coucher en ayant le ventre plein afin que ma mère soit tranquille. Ne supportant plus les cris, elle avait compris que lorsque l'estomac était suffisamment plein, la famille la laissait tranquille. Mes tantes m'ont dit que même bébé, mon biberon était trop plein et que même si je n'en voulais plus, ma mère me forçait à le boire.

Puis, en grandissant, il fallait finir toute l'assiette : composée essentiellement de plats riches. Par exemple : une entrée avec oeufs mimosas ou maïs mayonnaise ou autre + lasagnes ou pizzas ou autre + viande + fromage + pain + salade + dessert. Il fallait finir tout ! Même sans faim...

Vous comprenez qu'en mangeant des aliments riches et avec une assiette d'adulte pour un estomac d'enfant, inutile de faire un dessin pour savoir qu'une obésité infantile allait forcément se développer. Mais, ma mère était fière car les voisins lui disaient que j'étais belle jusqu'à l'âge de 5 ans. Puis, j'ai commencé à prendre 5 à 10kg par an jusqu'à l'âge l'adolescence.

Entre temps, il fallait supporter toutes les moqueries des camarades de classes, des jeunes, de la famille car j'étais trop grosse, et barbue (mais il s'agit là, d'un autre sujet auquel j'ai remédié à présent).

Pour lutter contre l'indifférence de mon père et ses insultes très humiliantes, je me suis mise à travailler comme une folle à l'école en étant toujours dans les premières de la classe jusqu'à m'en rendre malade. La nuit, je pleurais si je ne savais pas parfaitement mes leçons ou si je n'avais pas compris un sujet de mathématiques. Les parents étant de nationalité étrangère, ils ne pouvaient m'aider. Je pensais que j'allais avoir les honneurs de mon père en montrant que je moi-aussi j'étais travailleuse, en vain ..... Il n'a jamais regardé mes cahiers, jamais félicité, jamais rien.....

Du côté de ma mère, elle regardait mes cahiers mais je ne comprenais pas ce qu'elle pensait de moi ! car elle pleurait tout le temps et je finissais par pleurer avec elle car je croyais que c'était ma faute car elle ne me voulait pas.

Tout çà pour expliquer le besoin de se réfugier tout de suite vers la nourriture. SANS FAIM. Ce contexte était trop dur à gérer émotionnellement et dans la nourriture que je trouvais le réconfort dont j'avais besoin.

Le soir, j'avais ma période où j'en étais malade car j'avais trop mangé et j'avais envie de vomir. Une phobie s'est créée car j'avais peur de vomir ! Je demandais sans cesse à ma mère que j'allais vomir et elle me faisait de l'eau sucrée pour digérer. Une autre peur, reste celle du noir la nuit....

Toutes ces peurs ont surgies mais elles n'ont jamais eues de réconfort ou d'explications.

A 13/14 ans, en rentrant au lycée, j'en avais marre de toutes ces insultes et de cette humiliation ambiante et de cette bouffe. J'ai entamé un régime qui m'a fait perdre 40kg en 6 mois. Un évènement familial m'a choqué et çà a été l'élément déclencheur qui m'a mis en dégoût toute cette bouffe. Une fatigue énorme et la perte de mes cheveux sont les désagréments majeurs. Il a fallu que je redouble ma seconde car j'étais trop fatiguée et je n'arrivais plus à suivre en cours. Puis, j'ai perdu progressivement du poids, de 98kg je suis passée à 48kg. Je ne mangeais plus rien du tout et sans graisse, il m'arrivait de ne manger qu'une seule pomme par jour.

Dans ma tête j'étais toujours avec cette image énorme et je ne comprenais pas quand les garçons me draguaient, je pensais qu'ils se moquaient. Cette fois-ci, j'en ai eu des copines ! Mais uniquement pour me demander mon régime, et me poser des tonnes de questions sur mon amaigrissement. Je me suis sentie encore plus objet qu'avant et contrairement à ce que je pensais, j'étais déçue que tout le monde vienne me voir que pour çà. J'ai même des personnes jalouses qui analysaient tout ce que je mangeais pour faire pareil alors qu'elle n'avait rien à perdre. On entendait que ce mot REGIME - REGIME - REGIME et çà m'énerve tellement qu'encore aujourd'hui, je ne peux plus supporter ce mot.

Oui, je suis tombée un temps en faisant une anorexie et je tombais tout le temps dans les pommes en faisant 2h de sport par jour. Mon corps devait devenir parfait alors que je me voyais toujours énorme. Il m'est arrivé de craquer sur des croissants le matin et sur des biscottes beurrées (une cartouche entière) + chocolat... le soir, ensuite j'allais faire ma gym même à 2h du matin.

C'était jusqu'à l'arrêt du lycée. Un autre évènement a surgi : l'arrêt de mes études. Pour raison médicale, mon année de terminale a été faite chez moi et j'ai passé le bac en examen final sans aller en cours. Mes profs étaient en colère mais je ne pouvais pas. Je pleurais tout le temps et je n'avais plus de force.

Plus de force, plus de goût à rien.... car il fallait que je trouve du travail conformément à ce que voulait mon père. De mon côté, je voulais continuer mes études mais il fallait partir en grande ville dans un grand département car il n'y a pas d'université dans ma région natale.

Une révolte interne, incontrôlable m'a fait perdre tous mes sens. Je n'étais plus moi avec une énorme dépression et traitée au lithium et compagnie. De 45kg, je suis passée à 158kg et ce corps ferme était devenue énorme, ensanglanté par des vergétures quasi à vif. Ce corp me faisait mal de partout... Mon sommeil s'est inversé : je dormais très peu et le jour, et la nuit, je mangeais tout et n'importe quoi !

Mes pantalons étaient serrés mais je finissais par mettre des joggings, dans ma tête, je pensais n'avoir pris que 5 à 10kg mais en fait, j'en avais pris plus de 100. Je voulais mourir éclater par cette bouffe. Plus rien n'avait d'intérêt à part ma musique car je ne pouvais plus danser à cause de mon poids.

Ce souffle et toute cette transpiration ne m'empêchaient pas de bouffer car il fallait toujours que j'aille jusqu'au bout du trop plein de l'estomac.

C'est à cette époque que j'avais décidé de quitter la famille pour partir seule, loin sans connaître rien ni personne pour une nouvelle vie. Oui, je suis partie avec mes sacs car c'était soit çà soit mourir à la maison. Ma mère m'en a voulu mais je ne pouvais pas. Mon père était bien content d'avoir une bouche en moins à nourrir.

Des années plus tard, j'entends ma mère me dire : "heureusement, que je ne t'ai jamais rien dit quand tu avais trop grossi". Elle venait me demander si je voulais manger 2 ou 3 steacks hachés avec une tonne de frites et elle me les faisait sans rechigner.

Cette phrase m'a choquée et j'ai enfin compris que non seulement que j'ai jamais eu d'autorité parentale et encore moins en matière de nourriture. J'ai toujours voulu poussé les limites en signe de tirage d'alarme mais personne ne disait rien.

Comment voulez-vous en temps qu'adulte, se faire son autorité parentale en matière de contrôle quand le cerveau est programmé pour faire ce qu'il veut depuis des années ? Telle est la question qui me demande beaucoup de temps, d'énergie et discussions avec le psychiatre pour remédier à cette maladie. C'est avec beaucoup de colère que j'essaye de me battre car je ne comprends pas pourquoi ma vie est bousillée à cause d'une inconscience ! Le pardon est trop facile dans ces cirsconstances surtout quand les personnes concernées ne comprennent absolument pas les raisons pour lesquelles "je fais tout un foin pour rien". Bien sûr qu'il est facile de parler de la sorte quand ce "rien" est la personne qu'on a jamais voulu.

Jusqu'à longtemps, les médecins me disaient que j'étais boulimique. Je rectifiais en disant que je refusais de vomir. C'est en rencontrant mon nouveau médecin traitant qui est spécialiste de l'obésité, qui m'a expliqué qu'il s'agissait plutôt d'une hyperphagie compulsive.

Le refus de vomir vient d'une punition que je m'inflige car je n'avais pas à manger comme çà : en très peu de temps, je dois m'ingurgiter tout ce dont j'ai envie (gâteaux, chocolats, fromages, plats cuisinés gras, chips...) jusqu'à ce que je sois pleine de l'estomac à la gorge. Il s'agit d'une culpabilité énorme et je l'assume en me sentant mal (car j'ai trop mangé) et en sentant sur mes cuisses le gras apparaître (cela fait comme des chatouillements).

Mes crises peuvent se faire plusieurs fois par jour et uniquement le jour. Elles résident sur les émotions que je n'arrive pas à gérer. Que ce soit pour du bonheur (trop de joie) ou pour du malheur (mauvaise nouvelle, déception...).

C'est la première fois que j'ose écrire tout çà et en plus sur internet. Bien sûr, je suis friande de tous les articles sur l'obésité, l'anorexie, les émissions sur les régimes, les livres de psychologie et des histoires vécues.

Le vécu des gens m'aide à mieux comprendre la maladie et surtout m'aide à comprendre que je ne suis pas toute seule dans ce cas et que l'on peut sans sortir. Oui, ensemble, il faut sans sortir, et apprendre à faire le recul sur cette bouffe.

Quand la bouffe deviendra le manger, là, je serais guérie.

 



02/05/2009
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