COMBAT CONTRE L\' HYPERPHAGIE COMPULSIVE

Les schémas cognitifs 1/2

Etant donné la complexité du sujet, je vais me contenter de reprendre exactement ce que les sites auxquels j'indiquerais la source diront sur ce sujet. Car il suffit qu'un mot soit mal rédigé ou interprété pour que la compréhension du sujet en soit affectée.

Aaron Temkin Beck, né en 1921, est un psychiatre américain, professeur émérite du département de psychiatrie de l'Université de Pennsylvanie, et considéré comme le père de la thérapie cognitive et de critères d'évaluation mondialement utilisés (dont Beck Depression Inventory (BDI), Beck Hopelessness Scale , Beck Scale for Suicidal Ideation (BSS), Beck Anxiety Inventory (BAI) et Beck Youth). En 2006, il reçoit le Prix Albert Lasker pour la recherche médicale clinique. Il est le président de l'institut Beck pour la recherche et la thérapie cognitive.

 

Lorsque l'on parle de l'approche cognitive, nous faisons référence à la façon dont nous traitons l'information. Plus précisément il s'agit du choix que nous faisons de l'information et de son interprétation. Ces deux opérations dépendent en large partie de nos schémas cognitifs c'est-à-dire de la façon dont nous sélectionnons certains aspects de l'information en fonction de nos expériences vécues. Ces expériences vont créer des manières d'interpréter l'information et ces manières peuvent parfois être erronées. Ces dernières  sont régies par nos processus cognitifs qui sont des règles logiques (en principe) de transformation de l'information afin de permettre de  nous adapter aux demandes de l'environnement. Mais il peut arriver que ces règles soient établies à partir de croyances irrationnelles ou d'illusions. Il peut nous arriver à tous à un moment de notre vie ou l'autre  de succomber à des idées irrationnelles ; cependant lorsque ces idées irrationnelles prennent la forme d'un schéma cognitif, nous risquons fort de nous retrouver dans un état de désordre psychique. Ce désordre est causé par une information qui entre en conflit avec les intentions existantes et qui empêche dune réponse adaptée. Ainsi les gens qui entretiennent l'illusion de perfection auront énormément de difficulté a mener à bien une tâche car il trouverons toujours quelque chose qui fait défaut au moment de la réaliser et pourrons dans certains cas éviter de s'impliquer dans des projets de peur de ne pouvoir atteindre la perfection.

Ces schémas cognitifs déficients peuvent avoir comme conséquence des pensées automatiques négatives, des ruminations, de l'autoverbalisation, des images mentales catastrophiques et des comportements obsessifs se traduisant souvent par un besoin d'hyper contrôle. Je n'ai pas confiance en moi, je n'ai pas confiance dans les autres et je dois sans cesse me méfier de mon environnement sinon je vais me faire avoir… Voilà le genre de schéma cognitif que peut développer une personne à qui  les expériences vécues n'ont pas permis de faire confiance à son environnement

Pour la  psychanalyse, cette confiance se développe dès l'enfance vers trois ans. C'est une période ou l'enfant acquiert  des apprentissages fort importants qui lui permettront de poser les bases de son estime de soi. Il s'agit de l'apprentissage du contrôle des sphincters, du contrôle de la marche et du contrôle du langage. Ainsi  l'enfant qui s'est senti appuyé et reconnu dans ces apprentissages, pourra par la suite développer une estime de lui-même lui permettant de prendre certains risques, de faire de nouveaux apprentissages et de nouvelles expériences qui le rendront plus efficace et mieux adapté à son environnement.

 

Pour l'approche cognitive, le lieu de contrôle  et la croyance en son efficacité personnelle sont deux aspects fondamentaux reliés à une bonne capacité d'adaptation et à une bonne efficacité dans la résolution de problèmes.

Par lieu de contrôle nous entendons la source  de la  responsabilité de nos succès et de nos échecs. Lorsqu'une personne possède un bon lieu de contrôle interne, elle est en mesure d'accepter la responsabilité de ses succès et de ses échecs tout en étant consciente qu'il peut toujours  exister des situations incontrôlables pouvant la mener à des échecs. À l'inverse, une personne dont le lieu de contrôle est externe aura tendance à attribuer ses succès au hasard et tous ses échecs à des évènements extérieurs incontrôlables. À long terme, une telle attitude peut mener à ce que l'on appelle l'impuissance apprise La croyance à son efficacité personnelle peut provenir de quatre sources : la première provenant des expériences relatives à la maîtrise de nouvelles habiletés. Nous rejoignons ici la notion de base de l'estime de soi de la psychanalyse. La deuxième source est l'observation de personnes compétentes ; cette observation devrait permettre à l'individu de prendre des risques tout en s'ajustant au modèle. La troisième source est la persuasion d'autrui. Nous avons tous au cours de notre vie osé certaines expériences grâce à l'encouragement des autres. L'enfance et l'adolescence sont des moments privilégiés pour cette source ! La dernière source passe par notre capacité d'évaluer notre état physiologique ; la connaissance de notre corps, de ses capacités, de ses limites. L'état d'épuisement que l'on retrouve trop souvent chez certains individus est souvent relié à l'incapacité de faire une bonne évaluation de leur état physiologique.

 

 

 

 

Plus simplement, on pourra retenir que nos "cognitions" sont nos croyances et nos pensées.

 

• Nos émotions sont le fruit de nos pensées.

"You feel the way you think." D. Burns.

C'est là le principe premier de la thérapie cognitive : ce n'est pas le monde extérieur qui est la cause de nos émotions et de notre humeur, mais seulement la représentation que l'on en a et les pensées qui nous traversent l'esprit.

 

Cette idée est en fait très ancienne. Les philosophes stoïciens de l'antiquité l'avaient déjà clairement exprimée il y a deux millénaires (voir Stoïcisme et Thérapie Cognitive).
Les fondateurs de la thérapie cognitive, dans la deuxième moitié du 20ème siècle, ont d'ailleurs toujours ouvertement affiché l'influence de la philosophie stoïcienne sur leur théorie.

Si la dépression était la conséquence de conditions de vie difficiles, on devrait en théorie observer des vagues de cas de dépression en période de guerre, ou dans des pays touchés par la malnutrition. Or on constate plutôt le contraire (on se suicide moins en temps de guerre qu'en temps de paix, moins en Afrique qu'en Europe). En fait, il apparaît qu'une grande proportion des personnes souffrant de dépression ont une vie que d'autres pourraient considérer comme a priori satisfaisante, voire enviable : situation financière normale, famille aimante, pas de traumatisme particulier, pas de maladie organique, pas de pression ni de danger marquant.

Dans le cas de la dépression, elle n'est pas causée par l'environnement du sujet, mais par les pensées et les schémas mentaux qu'il emploie pour l'interpréter. C'est donc en apprenant à travailler sur ses cognitions qu'une personne pourra sortir de sa dépression. C'est précisément là le but d'une thérapie cognitive.

 

Les distorsions cognitives.

Les cognitions étant par nature plus ou moins subjectives, elles peuvent conduire le sujet à une vision approximative, déformée, voire totalement inexacte du monde.

Chez le sujet dépressif, les distorsions cognitives, c'est à dire des interprétations et des représentations biaisées du monde privilégiant systématiquement une vision négative et pessimiste des choses, sont responsables de son incapacité à évaluer la réalité de manière positive ou neutre. Le patient ne semble plus capable d'objectivité.

Ces distorsions peuvent concerner des domaines plus ou moins importants de la vie d'une personne.

Aaron Beck a défini la dépression comme étant le résultat de distorsions dans trois domaines majeurs :

1.    Cognitions sur soi.

2.    Cognitions sur l'environnement (le monde et les autres).

3.    Cognitions sur l'avenir.

Ces 3 grands types de distorsions constituent ce que l'on appelle la triade de Beck. On peut les retrouver à des degrés divers chez tous les patients déprimés.


Exemples de distorsions cognitives chez un patient dépressif :

Cognition sur soi : "Je ne vaux rien", "Je ne suis pas à la hauteur".
Cognitions sur l'environnement : "Ce monde est pourri", "Les gens sont égoïstes".
Cognitions sur l'avenir : "Rien ne s'améliorera jamais", "C'est sans espoir".

Chez une personne dépressive, ces expressions ne sont pas de simples paroles en l'air destinées à attirer l'attention. Elle correspondent à la véritable représentation mentale qu'elle se fait du monde et d'elle-même.

Comme nous le verrons dans les paragraphes suivants, le rôle du thérapeute est de faire prendre conscience au patient de ces distorsions cognitives, et de l'amener à une représentation plus "normale" et plus rationnelle des choses. Pour cela, il va, dans un premier temps, devoir apprendre au patient à devenir métacognitif, c'est-à-dire l'amener à réfléchir à la manière dont il pense. (cette capacité à réfléchir à la manière dont on pense apparaît habituellement chez l'enfant vers l'age de 6 ans. Elle tend à disparaître chez les personnes souffrant de dépression).
 


• Les 10 pensées dysfonctionnelles types.

Les pensées dysfonctionnelles sont des distorsions cognitives très courantes chez les personnes dépressives. Ce sont des façons de penser stériles, souvent stéréotypées, qui s'appliquent de manière quasi-automatique (on parle également de "pensées automatiques"), et amènent le sujet à avoir une vision très sombre du monde.


Voici les 10 pensées dysfonctionnelles les plus répandues (liste d'après A. Beck & D. Burns) :
 

Liste des pensées dysfonctionnelles

1- La pensée dichotomique (principe du tout ou rien). C'est le fait de penser que si une chose n'est pas exactement comme nous le souhaitons, alors il s'agit d'un échec. Il s'agit d'une perte totale des nuances. Ex. : "Si je n'ai pas été embauché, c'est que je ne vaux rien", "Si je n'ai pas 20 sur 20 à cet examen, c'est que je suis nul". Dans ces conditions, avoir 18 sur 20 à un examen, ou n'être "que" le second de sa promotion peuvent être perçus comme des échecs cuisants.

2- La surgénéralisation : on construit des règles pour son comportement futur à partir de quelques événements négatifs passés. Ex. : "Elle n'a pas voulu sortir avec moi ; je vois bien que je n'arriverai jamais à sortir avec une fille". Avec la surgénéralisation, un seul événement négatif peut influer tout le comportement à venir d'une personne qui se voit alors vouée à l'échec. On peut distinguer 2 grands types de surgénéralisation

2-a : La surgénéralisation verticale : un échec dans un domaine à un moment donné, et c'est tout le domaine en question (passé, présent et avenir) qui est perçu comme un échec et perdu d'avance. Ex : "Elle ne veut pas sortir avec moi. J'ai toujours tout raté en amour, je serai seul et malheureux toute ma vie".
2-b : La surgénéralisation horizontale : c'est le fait de lier entre eux des problèmes différents, là où ça n'a pas lieux d'être. Un échec dans un domaine va amener la personne à voir des échecs dans tous les domaines. Ex. : "J'ai été licencié de mon entreprise, ce n'est pas étonnant, je rate tout ce que je fais dans la vie".


3- L'abstraction sélective : c'est un filtre mental qui ne laisse percevoir que le côté négatif des choses. On se focalise sur les détails déplaisants, ce qui nous conduit à voir l'ensemble en négatif. Ex. : une personne passe une soirée avec des gens agréables et intéressants, elle s'amuse, elle danse, lorsque quelqu'un renverse du café sur sa chemise. A cause de cet incident, elle en conclut que la soirée est totalement gâchée. Autre exemple : un joueur de tennis gagne lors d'une rencontre sportive, mais au lieu de s'en réjouir, il passe plusieurs jours à ressasser les erreurs qu'il a commises pendant le match et à s'en faire le reproche.

4- La disqualification du positif : on transforme une expérience neutre ou positive en expérience négative. Ex. : on me fait un compliment, j'en déduis que "tout le monde sait que c'est faux, on me dit ça juste pour me faire plaisir", ou encore : "Le soutien des gens qui m'aiment ne compte pas. Ils ne connaissent pas ma vraie nature". C'est une sorte d'alchimie inversée où l'on transforme de l'or en plomb.

5- Les conclusions hâtives (ou principe de l'inférence arbitraire) : on imagine des scénarios noirs sans preuve et on y porte crédit. On peut en distinguer 2 sortes :

5-a : Les lectures des pensées d'autrui : C'est lorsque l'on croit connaître les pensées des autres en se fiant à de maigres indices. Ex: "Je lui ai laissé un message mais il ne m'a pas rappelé, il ne me considère plus comme son ami.", ou bien : "Mon patron m'a regardé de travers, il pense certainement me licencier".
5-b : Les erreurs de voyance : faire des prédictions pessimistes et les considérer comme vraies. Ex. : "Je vais devenir folle.", "Cette thérapie ne marchera pas, je suis incurable.", "Je vais rester seul toute ma vie."


6- Exagération (dramatisation) et minimalisation : on exagère ses erreurs et on minimise ses points forts. Exemple d'exagération : "J'ai fait une erreur au travail, tout le monde va le savoir et je serai complètement ridicule aux yeux de tous." ; Exemple de minimalisation : "J'ai trouvé la solution au problème, mais c'est simplement parce que j'ai eu un coup de chance".


7- Le raisonnement émotionnel : c'est se servir de ses sentiments comme s'il s'agissait de preuves. Ex. : "Je me sens désespéré, donc mes problèmes doivent être impossibles à résoudre." ; "Je ne me sens pas de taille à affronter une situation, donc je suis un looser." ; "Si je me sens dégoûté de ce monde, c'est parce qu'il n'a rien à m'offrir" ; "Si je suis angoissé tout le temps, c'est bien qu'il y a quelque chose qui ne va pas".

8- Les fausses obligations ("musturbation" en anglais) : Se fixer arbitrairement des buts à atteindre (je dois, je devrais…). Ex. : "Je dois absolument faire le ménage chez moi.". Résultats : si l'on n'atteint pas ses objectifs, on se sent coupable. On peut également appliquer cette règle pour les autres (on me doit…) : "Après tout ce que j'ai fait pour lui, il pourrait au moins être reconnaissant." Cela conduit à un sentiment d'amertume, de ressentiment, et à l'idée que l'on est la seule personne à se conduire convenablement.

9- L'étiquetage : ce sont des jugements définitifs et émotionnellement chargés que l'on porte sur les autres ou sur soi-même. Ex. : "Cette personne est un monstre." ; dire "Je suis complètement nul" au lieu de dire "J'ai fait une erreur".

10- La personnalisation : se sentir responsable du comportement des autres. Ex. : "Si mon fils ne travaille pas à l'école, c'est parce que je suis une mauvaise mère.", "Ce qui arrive est ma faute." La personnalisation conduit à un sentiment de culpabilité. C'est l'erreur consistant à penser pouvoir gérer la vie des autres (alors qu'on ne peut que l'influencer).

Au commencement d'une thérapie cognitive, le patient devra étudier, comprendre et apprendre cette liste de pensées dysfonctionnelles. Avant toute forme d'introspection, le patient sera amené, grâce à des exercices, à repérer et mettre en évidence ces différentes pensées dysfonctionnelles sur des exemples types (exemples d'exercices).

 

Une fois bien exercé, il pourra commencer à relever et mettre en évidence ces distorsions dans sa propre façon de penser.
Pour cela, il pourra être amené à employer un outil très utile : les fiches d'autoévaluation de Beck.
 

• Les fiches d'autoévaluation de Beck

Il s'agit d'une technique très simple élaborée par Aaron Beck pour aider ses patients à mettre en évidence clairement leurs pensées dysfonctionnelles afin de mieux les analyser. Les patients disposent ainsi d'un outil qui leur permet par eux-mêmes d'avoir une approche plus rationnelle et moins stérile de leurs problèmes.
 

Il s'agit d'un formulaire constituée de 5 colonnes que l'on remplit de gauche à droite :

 

 

·         1ère colonne : Situation : on y décrit rapidement l'événement ou la situation qui a déclenché la contrariété. On n'y inscrit aucune émotion, ni aucune pensée, mais uniquement des faits. (par exemple : j'ai laissé un message téléphonique à mon ami et il ne m'a pas rappelé)

·         2ème colonne : Emotion : décrire et évaluer le plus précisément possible les émotions ressenties en pourcentages de 0 à 100. L'émotion globale est à décomposer en terme de : tristesse, colère et anxiété qui sont souvent les trois principales composantes d'une humeur négative. Le patient peut éventuellement en ajouter d'autres (frustration, dégoût, etc...).

·         3ème colonne : Pensées automatiques : C'est la liste de toutes les pensées qui nous passent par la tête et qui nous rendent malheureux, anxieux, ou en colère. On indiquera le niveau de croyance global pour ces pensées automatiques. (on peut également préciser le niveau de croyance pour chaque pensée automatique).

·         4ème colonne : Réponses rationnelles : il s'agit ici de prendre du recul par rapport aux pensées de la colonne précédente et de les analyser en mettant en évidence les pensées dysfonctionnelles exactement comme cela a été décrit dans les exercices du chapitre précédent (liste des pensées dysfonctionnelles). On fera enfin la liste des réponses rationnelles face à l'événement ou la situation. On indiquera le niveau de croyance global pour ces réponses rationnelles (on peut préciser également le niveau de croyance pour chaque réponse rationnelle).

·         5ème colonne : Résultat : après avoir inscrit les pensées automatiques et les réponses rationnelles qui s'y rapportent, on évalue à nouveau les émotions ressenties en terme de tristesse, d'anxiété et de colère. On indiquera également l'intensité globale de l'émotion après analyse, que l'on pourra, bien sûr, comparer avec l'intensité globale de l'émotion avant analyse (colonne 2).

 

La fiche d'autoévaluation de Beck n'est pas un outil qui fait disparaître toutes les contrariétés de la vie. En revanche, elle permet de rationaliser l'approche que l'on peut en avoir. Très souvent, cette technique conduit à une nette amélioration de l'humeur du patient par rapport à une situation donnée.

Au début de la thérapie, le patient apprendra à remplir ces fiches avec l'aide de son thérapeute afin de bien en comprendre les principes. Il pourra ensuite très rapidement utiliser cette technique seul et acquérir de plus en plus d'autonomie dans la gestion de ses problèmes au quotidien.

Dans le cadre d'une thérapie cognitive, le patient est invité à remplir une fiche de Beck à chaque fois qu'il rencontre une contrariété, ou simplement lorsqu'il se sent mal (tristesse, anxiété, colère). Il peut ainsi être amené à en remplir plusieurs par jour.
Le patient pourra conserver ces fiches afin d'avoir un suivi de son travail.
Même si une contrariété donnée a déjà fait l'objet d'une fiche dans le passé, le patient ne doit pas hésiter à en remplir une autre sur le même sujet.

La fiche d'autoévaluation est une technique à utiliser sans modération. En effet, si des distorsions cognitives répétées peuvent rapidement conduire à la dépression, la rationalisation ne peut, quand à elle, avoir que des effets bénéfiques sur l'humeur des patients et leur manière d'appréhender leurs problèmes.

Nous avons jusqu'alors abordé des cognitions dont il était relativement facile de prendre conscience d'un point du vue métacognitif (c.à.d la capacité à analyser sa propre façon de penser). Nous allons maintenant aborder un niveau de cognition plus difficile à mettre à jour : les schémas cognitifs.
 


• Les schémas cognitifs.

Les schémas sont les grandes structures de base de l'organisation cognitive d'un individu. Ce sont des cognitions fondamentales stables et rarement exprimées directement. Les schémas s'appliquent de manière automatiques et commencent à se construire très tôt chez l'enfant. (voir Construction des schémas)


Ils sont ancrés profondément et ne sont pas toujours faciles à mettre à jour. Ces schémas nous amènent à avoir une représentation du monde partielle et très simplifiée. Ils tendent à nous aiguiller systématiquement vers des jugements et des comportements stéréotypés. A partir d'une situation ou d'un événement donné, ils nous fournissent une anticipation de l'avenir.

S'ils nous aident à appréhender notre environnement en nous permettant de ne pas avoir à tout réinventer lorsque nous faisons face à une situation déjà rencontrée, les schémas cognitifs peuvent également nous handicaper, car ils sont très réducteurs, déformant à outrance la réalité et agissant comme des œillères. D'une manière générale, les schémas cognitifs, sans nous laisser le choix, ferment beaucoup de portes, et en ouvrent peu. Chez les personnes dépressives, cela peut aboutir à une véritable vision tunnellaire du monde.

Les personnes dépressives ont souvent des avis très tranchés sur les sujets sensibles : l'amour, la vie, l'amitié, le monde, les autres, eux-mêmes. Ces opinions sont généralement le fruit de schémas cognitifs très forts qui laissent malheureusement peu de place à la nuance.

Le rôle du thérapeute est de permettre au patient de prendre conscience de ces schémas (par des techniques que nous verrons ensuite), et de l'amener à envisager d'autres options, d'autres façons de voir les choses, de manière plus rationnelle et moins stéréotypée.

Exemples de schémas :

  • "Ma valeur dépend de l'estime des autres".
  • "Je ne suis rien sans amour".
  • "Pour être heureux, je dois réussir tout ce que je fais".
  • "Je suis en danger si je n'anticipe pas tous les problèmes".
  • "Il faut toujours tirer les leçons de ses échecs".
  • "On ne peut pas être heureux si on n'a pas trouvé un sens à sa vie".

Nota Bene : Si les techniques type Fiches d'autoévaluation de Beck, permettent au patient de se sentir mieux dans sa vie quotidienne en l'amenant à rationaliser ses pensées conscientes, elles ne s'attaquent pas aux causes de la dépression. Mettre à jour les schémas cognitifs d'une personne, et l'amener à les analyser, permettra de traiter les causes, et pas simplement les symptômes de la dépression.
 

Les schémas étant généralement inconscients et rarement verbalisés (on parle de "postulats silencieux"), le thérapeute doit employer certaines techniques pour les mettre à jour lors de la thérapie. La plus utilisée se nomme la technique de la flèche descendante.


• La technique de la flèche descendante (Bottom line)

Nous avons vu que la technique de la fiche de Beck consistait à partir d'une pensée dysfonctionnelle, et de l'analyser de manière rationnelle afin d'amener le patient à une vision plus réaliste, plus neutre, et moins émotionnelle des choses.

Dans le cas de la flèche descendante, nous allons faire exactement le contraire : Nous allons partir d'une pensée dysfonctionnelle (consciente) exprimée par le patient, et faire "comme si c'était vrai", afin de pouvoir descendre le plus profondément possible dans des niveaux cognitifs de plus en plus inconscients jusqu'à ce que l'on puisse accéder aux schémas cognitifs qui sont à l'origine de cette pensée.
 

Le meilleur moyen de comprendre cette technique est de l'illustrer par un exemple :

-Patient : "Mon responsable m'a dit que le client était mécontent de mon travail".
-Thérapeute : "Oui, d'accord, et quel est le problème ?".
-P. : "Il pense sûrement que je suis un ingénieur très médiocre"
-Th. : "Si c'est vrai qu'il le pense, pourquoi est-ce que cela vous ennuie ?"
-P. : "Parce que cela veut dire que je suis effectivement un très mauvais ingénieur, il sait de quoi il parle !"
-Th. : "Peut-être, mais si c'est le cas, en quoi cela vous gêne ?"
-P. : "Ca veut dire que je suis un raté total, un bon à rien."
-Th. : "Bon, et si vous êtes un raté total et un bon à rien, en quoi est-ce que cela est gênant ?"
-P. : "Et bien tout le monde finirait pas s'en rendre compte. Plus personne ne me respecterait. Je serais licencié et je ne pourrais plus jamais trouver de travail dans mon domaine. Je serais obligé de changer de région."
-Th. : "D'accord, et cela signifierais quoi pour vous ?"
-P. : "Cela voudrait dire que je suis complètement nul et inutile. Je me sentirais si malheureux que je voudrais mourir."

Dans l'échange précédent, on peut ainsi mettre en évidence 3 schémas cognitifs chez le patient :

1. : si quelqu'un me critique, il a forcément raison.
2. : ma valeur dépend de mes réalisations.
3. : une erreur, et tout est gâché. Si je ne réussis pas tout le temps, je suis nul.

Une fois l'enchaînement des pensées automatiques établi, et une fois les postulats silencieux identifiés, le travail du patient, avec l'aide du thérapeute, est alors d'analyser l'échange précédent, et, pour chaque étape, d'en faire ressortir les pensées dysfonctionnelles afin de les remplacer par des réponses rationnelles. (analyse du cas précédent).

Le thérapeute amènera ensuite le patient à faire une analyse coût-bénéfice de ses schémas cognitifs à l'aide d'un tableau à deux colonnes.

On retrouve très souvent les mêmes types de schémas chez les personnes dépressives. Un test des croyances dysfonctionnelles peut aider à les mettre en évidence.

En conclusion, je suis à ce stade dans la thérapie cognitivo comportementale (TCC) dont le but est de travailler sur notre comportement (sous la forme d'exercices) afin d'aboutir au bien-être. Elle ne suffit pas à elle seule car de mon côté, je suis suivie en thérapie classique. Autant vous dire que c'est très long et qu'il y aura des hauts et des bas comme d'habitude !

Sources :

Approche cognitivo-comportementale PSYBERNETIQUE.com

Thérapies Cognitives de la dépression THERAPIECOGNITIVE.free.fr

Dr. Aaron T. Beck's Biography BECKINSTITUTE.org

Aaron Temkin Beck sur WIKIPEDIA



30/03/2011
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