COMBAT CONTRE L\' HYPERPHAGIE COMPULSIVE

Un poids à 2 chiffres mais à quel prix ?

Après un an et demie de thérapie cognitive et comportementale spécialisée en trouble du comportement alimentaire (TCC TCA), je suis fière d’annoncer que j’ai perdu 65kg seulement :

 

-         j’accuse d’une très grande fatigue et prochainement je serai perfusée toute une journée en vitamines. A vrai dire, le dynamisme est présent mais sur une période plus courte qu’avant et j’ai besoin de me reposer souvent.

 

Il faut dire que ce n’est pas que l’amaigrissement qui me fatigue mais aussi beaucoup la thérapie qui soulève monts et montagnes dans tous les domaines. S’y impliquer m’épuise beaucoup. En fait c’est le démon de la maladie qui m’épuise : cette voix qui me dit que je suis nulle, incapable, moche, que je vais rechuter etc… Cette voix toujours négative est présente depuis mon enfance car c’est une conséquence des schémas cognitifs qui sont stockés en mémoire à vie (voir les 2 articles sur ce sujet). On ne peut pas irradiquer un schéma cognitif ni changer de comportement mais on peut apprendre à y porter moins d’importance et donc vivre mieux, plus sereine.

 

En parallèle j’ai cette autre voix qui me dit que je peux y arriver, qui me rassure etc… sauf que souvent cette voix positive est écrasée par celle négative.

 

Voilà donc le travail le plus difficile à accomplir dans la TCC TCA, cette voix positive raisonne en « adulte sain » alors que la voix négative raisonne en tant que « parent protecteur » ou « petit enfant » etc… Il s’agit d’apprendre à écouter et faire confiance à cette voix positive qui a souvent raison et rassure. Le combat est dur, long et fatiguant. J’avoue qu’à un moment donné j’étais perdue, je n'arrêtais plus d’avoir ces voix qui se battent dans ma tête. J’ai pensé que la TCC TCA était trop forte que je n’arriverais pas à la supporter. Heureusement l’équipe médicale est là pour aider car selon elle, c’est normal de passer par ces étapes. De toute manière on nous oriente vers des exercices personnalisés : les miens ne sont pas forcément ceux des autres, tout dépend comment chacun supporte la thérapie. Certaines personnes n’ont pas la même avancée car ont besoin de travailler plus ou moins longtemps sur les exercices et thèmes à aborder.

 

J’avais très très peur d’arriver à un poids à 2 chiffres car je me souviens, il y a quelques années, que pour y arriver j’avais toujours les crises alimentaires mais je faisais 5h de sport par jour. J’avais peur de retomber dans ce tourbillon infernal, peur de manger des féculents le soir, par peur de grossir… A partir du moment où j’ai commencé à perdre du poids avec la thérapie, j’ai recommencé à avoir tous les démons TCA qui me sont revenus : besoin de se peser pour tout et rien, besoin de contrôler mes aliments pour ne pas grossir, besoin de m’épuiser au sport etc…

J’en ai parlé en thérapie que tous ces vieux démons depuis l’âge où j’ai été anorexique restrictive étaient revenus. J’ai la fascination du jeûne qui est revenue et j’ai même jeûné quelquefois. A présent je ne le fais plus car j’ai compris que çà m’induisait de fortes compulsions alimentaires (sortes de début de crises).

 

J’ai rechuté en mai-juin 2012 en commençant par des compulsions alimentaires pour finir en crises comme avant. J’avais repris presque 10kg. L’équipe médicale TCC TCA m’a bien aidée sinon si je n’aurai jamais pu remonter la pente toute seule. J’avais tellement peur de rechuter que finalement j’avais rechuté et le sport à outrance n’a pas permis de dépenser toutes les calories ingurgitées.

 

A un moment où je pense être repartie sur le bon chemin, me voilà tordue de fortes douleurs gastriques. La colère me monte au nez car à cause de çà je ne peux plus capter les signaux de l’estomac de faim et de satiété. Ca fait des mois et des mois voire depuis le début de la thérapie que je travaille là-dessus et c’est en partie grâce à çà que j’ai pu perdre du poids. La panique à bord s’installe, comment faire sans les signaux de faim et satiété ? L’équipe médicale TCC TCA heureusement a été là pour m’aider encore une fois, à me rassurer. En fait, comme on doit tenir un journal des repas pris sur 4 jours uniquement avec toutes les collations, compulsions et crises, on m’a demandé de continuer à suivre mes repas comme j’avais l’habitude de faire même si je ne sens pas les signaux de faim et de satiété.

Et à un moment donné, je ne pouvais plus du tout faire de sport à cause de la fatigue.

Encore une fois il a fallu se battre contre la peur de rechuter et de regrossir. A chaque fois que j’allais au magasin, j’avais aussi le calvaire des achats compulsifs à gérer. Passer plus de 2h dans le magasin pour faire tous les rayons et tout regarder surtout les nouveautés çà m’obsède.

 

Heureusement la diététicienne spécialisée TCC TCA m’aide beaucoup. Il est plus facile d’aller tous les jours au magasin qu’en fin de semaine. S’exposer devant toute cette nourriture me stresse beaucoup au point quelquefois d’en pleurer et d’avoir mal à la tête. C’est toujours aussi compliqué après la voix positive me dit que demain ces articles seront encore dans le magasin ne pas m’inquiéter que le jour où j’en aurai envie, ils seront là. Je m’autorise un ou deux articles que j’ai envie et non 5 ou 6 ou 10 voire plus comme avant. De plus, je fonctionne en liste d’achats au jour le jour. Mes achats ont fini par s’amoindrir, j’ai toujours cette pulsion de stock alimentaire en grande quantité chez moi, la plupart est périmé car je n’exprime plus le besoin de me remplir comme avant. Comme j’ai peur de rechuter il est important de les garder chez moi, au cas où. Mais la dernière fois, j’ai jeté pas mal à la poubelle ce qui me fend le cœur quand on sait que certaines personnes n’ont rien à manger. Mais à présent, que je fais moins d’achats compulsions, quel bonheur de vous annoncer que je fais des économies !! L’hôpital m’a demandé de me faire un plaisir non alimentaire avec la même valeur d’achats alimentaires compulsifs. Quel plaisir de vous annoncer que j’ai pu m’acheter un disque dur portable 2T !

 

Du coup, je pioche dans le chocolat, les biscuits, de temps en temps quand j’en ai envie surtout avant d’aller au sport, je me dois de faire une collation sinon j’ai des crises d’hypoglycémie après l’effort maintenant. Ca fait 1 mois et demie qu’elles sont apparues.

 

Tout çà pour vous expliquer que c’est très difficile et surtout sans régime de vouloir sans sortir !!! Le plus difficile est le combat contre soi-même ces voix qui s’entretuent car la voix négative (du schéma cognitif) veut toujours avoir raison et gagner. Et puis j’ai dû arrêter le sport presque 6 mois à cause de la fatigue, une peur incroyable de regrossir, je crois que j’ai failli devenir folle. Idem, avec l’aide de l’équipe médicale j’ai pu me rassurer, me faire confiance, que j’étais maintenant capable d’arriver à suivre les signaux de mon estomac. Sauf que momentanément, j’ai eu les problèmes gastriques, donc panique à bord. Finalement en suivant mes repas comme d’habitude variés et sans faire de sport, mon poids s’est stabilisé et je n’ai pas grossi. Cet épisode m’a beaucoup aidé à comprendre qu’il faut faire confiance à ce corps qui sait se réguler seul. Mes repas se sont réduits un peu car sans sport et sans dépenses caloriques c’est normal qu’on mange moins.

 

A présent, je me sens soulagée et malgré tous ces soucis, finalement quand j’ai pu reprendre le sport, mes repas ont augmenté, les signaux de faim et satiété sont revenus, les problèmes gastriques presque plus présents et j’ai réintégré la collation l’après-midi et quelquefois le matin également. J’ai repris le sport soft avec moins de fréquences ce qui, à ma surprise, lors de la pesée chez le Dr, j’étais en dessous de la barre des 100kg. Moi qui avais tellement peur de faire moins de 100kg !! En fait j’ai peur de maigrir trop vite même si je suis encadrée par l’équipe médicale TCC TCA, j’ai peur de rechuter et ne pas savoir rebondir assez vite pour me remettre sur le droit chemin surtout lorsque l’on me dira que j’ai fini la thérapie. J’ai exprimé ma crainte, apparemment, je n’ai pas besoin de m’inquiéter car il faut compter au minimum 2 ans de thérapie et ensuite un suivi à la demande si on en exprime le besoin. Et puis çà fait plus de 15 ans que je n'ai pas fait un poids à 2 chiffres alors que c'est mon rêve !!

 

Je me sens plus sereine par moment car j’essaye d’écouter ma voix positive, cet adulte sain qui essaye de se faire une place après toute ces années d’anéantissement par la voix négative.

 

C’est le stress et les émotions qui sont compliqués à gérer. Maintenant j’arrive à reconnaître si je suis en colère, triste, joyeuse etc alors que j’étais à un point où bien avant cette réflexion, j’avais déjà fait une crise pour amoindrir le choc. Se sont développées en moi une intolérance émotionnelle et intolérance à la frustration. Seules les crises étaient capables momentanément d’anesthésier celles-ci.

Avec les exercices et la thérapie, on apprend à gérer différemment petit à petit tout çà sans passer automatiquement par la case alimentaire.

 

Je n’arrive pas toujours à tout gérer émotionnellement car les pensées automatiques de la maladie refont surface à tout moment. J’ai compris qu’elles seront toujours présentes. Seulement j’ai également compris, car je le vis actuellement, qu’en écoutant le moi positif, ces pensées automatiques étaient moins agressives et se manifestaient un peu moins. Et puis, petit à petit, je me rends compte que j’ai des peurs ridicules : pourquoi avoir peur d’un poids à 2 chiffres ? Après tout je me sens bien, je peux marcher, monter les étages en étant moins essoufflée etc… Quel bonheur donc pourquoi cette peur ? A force de voir le côté négatif des choses, l’automatisme veut que tout soit transformé en négatif et donc en peur. Le côté positif est quasiment inexistant. Apprendre à faire ressortir ce côté positif est ce qu’il y a de plus important.

 

Les repas de famille sont aussi compliqués car je ne supporte pas voir les gens manger en grande quantité : çà me rappelle moi avec mes crises ! Et puis j’ai peur quand je suis en famille avec les repas matin/midi/soir sur plusieurs jours. Il y a toutes ces réflexions à table où déjà je suis stressée par le(s) repas où on utilise ¼ de bouteille d’huile d’olive pour cuire et ensuite crue pour chaque aliment. Je ne vous raconte pas la panique à bord : toutes les pensées automatiques de la maladie refont surface. Heureusement j’ai ma petite voix positive qui me dit de ne pas m’inquiéter de bien suivre les signaux de faim et de satiété et je ne grossirai pas. Seulement j’avoue que deux jours après ma petite voix a complètement été aspirée par les pensées automatiques de la maladie. Et puis je n’arrive pas à comprendre qu’une personne puisse manger en grande quantité et rester mince alors que moi si je mange comme çà je prends immédiatement 30kg. Ses signaux de faim et satiété doivent donc être plus importants que les miens. J’ai aussi toujours cet automatisme de vouloir manger de tout en grande quantité immédiatement = compulsions qui se présentent. Le travail est de se dire : tu veux ok ! est-ce que ton estomac le peut ? Si tu en as envie manges-le fais-toi plaisir mais en respectant l’alimentation intuitive. Ce sont sans arrêt ces questions/réponses à se formuler dans la tête qui sont fatigantes avec cette peur de grossir en permanence. Par contre, c'est devenu une nécessité : mes goûts alimentaires sont peaufinés car je suis attirée vers plus de goût et de qualité de produits. Je suis à la recherche du plaisir gustatif plutôt que le gavage avec tout et n'importe quoi.

 

Je pense qu’il ne faut pas s’attendre à être guérie à 100% sans plus rien avoir du jour au lendemain. Ecouter ses besoins et ses envies, se faire confiance et surtout accepter que tous les jours ces pensées automatiques peuvent venir nous enquiquiner voire nous guider vers quelques petites rechutes, je pense que la guérison est :

 

-         la faculté d’apprendre à rebondir tout de suite dans toutes situations sans l’automatisme de la case alimentaire et donc d’accepter ces quelques petites rechutes si elles ont lieu sans culpabiliser.

 

Pour arriver à cette faculté, le chemin est dur et long (ce blog n’est pas fait pour raconter que tout est monts et merveilles) mais j’espère que vous pouvez y croire car moi j’y crois maintenant depuis mes petits soucis médicaux… Ce sont les expériences alimentaires et non alimentaires, l’encadrement médical et la thérapie de groupe qui aident beaucoup. Je fais tout mon possible pour ne pas louper une séance de TCC TCA même si c’est très fatiguant et difficile, j’y apporte grande importance car c’est le succès de ma réussite avec ses hauts et ses bas.

 

A chacun de trouver le meilleur moyen qui puisse l'aider à s'en sortir : thérapie de groupe et/ou individuel. De mon côté, j'ai les 2 c'est obligatoire en TCC TCA car certains thèmes ne peuvent pas forcément être abordées en groupe (ex : mutilation, suicide ou autre confidence dont on n'a pas envie d'exprimer en groupe...). Il est important de revoir son entourage : un tri est souvent utile mais pas indispensable. Selon votre convenance, à vous de voir l'entourage médical et/ou amical, familial qui vous conviendra le mieux pour vous accompagner et vous aider dans ce combat.



07/10/2012
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